Pourquoi R. Enthoven est-il appelé « philosophe » ?

Il m’est arrivé d’écouter ou de regarder Raphaël Enthoven qui, il faut le dire, est plutôt doué dans ce qu’il fait, parler. Aujourd’hui, je viens de le lire et je remarque qu’il est, à cet exercice, bien en dessous de ses capacités intellectuelles. Mais cela ne serait pas très grave si cette défaillance n’était d’abord morale.

Dans un article que vous pouvez lire et télécharger ici, le vulgarisateur de philosophie se victimise et victimise les pro-corrida qui, d’après ses dires, subissent les attaques violentes des anti-corrida.

A la question du titre, « Pourquoi les anti-corrida sont-ils si violents ? » l’auteur n’apporte aucune réponse. Mais ce n’est pas grave, son rôle c’est de vulgariser la pensée des autres.

Passons à l’article lui-même.

R. Enthoven reconnaît que la cause des anti-corrida est noble. Nous le remercions, c’est vraiment gentil de sa part. Mais, car il y a toujours un « mais » quand on commence comme ça, cette cause a des mauvais défenseurs. Certes, ce n’est pas parce qu’on a raison qu’on le dit de manière correcte, respectueuse ou plaisante. Cela, R. Enthoven l’a compris. Et il est vrai aussi que certains d’entre-nous devraient le comprendre. Les malhonnêtes et les faux nous attaqueront toujours sur ce côté-là. Oui, nous devons être irréprochables, ce n’est pas juste mais c’est comme ça.

R. Enthoven cite F. Wolff, le « philosophe » des entreprises de la corrida. « […] la corrida est un art, pathétique et sublime, de « tromper sans mentir ». Évidemment, on évite de raconter tous les « trafics » que les taureaux subissent avant d’entrer dans l’arène : modification des cornes, affaiblissement, solitude. « Tromper sans mentir » dit-il. C’est bien une phrase de sophiste ça et non de philosophe.

Cet art demande « courage, maîtrise de soi et sens de l’honneur ». Selon les calculs d’Élisabeth Hardouin-Fugier, entre 1950 et 2005, en Europe, il y a eu un matador tué pour 45.000 taureaux, ce qui fait 0,002 % de chances pour un humain de mourir au combat. Tu parles d’un courage ! Sur la « maîtrise de soi » il suffit de voir leurs mimiques aux tueurs de taureaux pour comprendre qu’il y a là plutôt de la colère, de la haine, du mépris, de la violence que de la maîtrise. Quant à l’honneur, tuer un innocent qui n’a rien demandé et prendre l’argent à la fin ressemble plutôt à un crime prémédité qu’à de l’honneur.

« Les taureaux sont traités comme des individus » : sélectionnés, élevés et tués dans le seul but de satisfaire les désirs humains, c’est ainsi que d’après F. Wolff on devrait traiter les « individus ». Quid de la définition d’individu ? Allez, vous êtes philosophe bon sang ! Et de plus, vous êtes vous-même un individu. Mais vous n’aimeriez surtout pas être traité de la même manière que l’individu taureau car vous, vous avez plus de valeur, certainement.

« […] qu’à tout prendre, il vaut mieux mourir dans l’arène en défendant sa liberté que dans un abattoir ». À tout prendre, il vaut mieux ne pas être obligé de risquer sa vie pour gagner sa vie. Le taureau a été placé de force dans cette situation, il a été de force rendu esclave. Dans les deux cas, l’abattoir et l’arène, la « noblesse » n’est que dans la tête des humains assoiffés de sang et déficients moralement. Et, à tout prendre, ni l’abattoir ni l’arène. Ce serait encore mieux si on respecte les animaux comme disent le faire les pro-corrida, n’est-ce pas ?

« […] la vraie barbarie serait que l’homme et le taureau courent le même risque. » Déjà, payer et organiser un spectacle où un être humain, être de notre espèce, des fois de notre famille, risque de mourir (même si, encore une fois, le risque est minime) est un acte barbare, immoral et relevant plus de la psychiatrie que de l’art. Mais, en plus de cela, applaudir et se réjouir de la mort et de la souffrance d’un innocent, fût-il d’une autre espèce, ne fait que rajouter du poids aux trois qualificatifs précédents. En tout cas, cette phrase montre aussi le fond de la pensée de R. Enthoven : un humain a plus de valeur morale qu’un taureau, et c’est déjà un présupposé anthropocentrique, et c’est déjà une arrogance injustifiée : c’est ce que l’on appelle spécisme.

Je crois qu’il n’est pas vraiment nécessaire d’écouter Wolff pour connaître ses arguments : ce sont les mêmes que ceux de n’importe quelle personne fortement alcoolisée assistant au crime d’un taureau. Sauf, peut-être, que le langage n’est pas le même. Mais le fond, lui, est identique et l’acte final, art ou soif de sang, est un : la mort d’un innocent.

J’aimerais bien que R. Enthoven définisse les termes «barbarie, terreur, horreur, décadence humaine, boucherie satanique, abrutissement collectif, tortionnaires, psychopathes, tueurs à gages, sadisme jouissif, apologie du sang » mais aussi leur contraire pour voir si le crime d’un taureau et sa préméditation peuvent en être synonymes ou antonymes.

Généralement, un lobby a des intérêts financiers ou idéologiques. Traiter les opposants aux crimes prémédités de lobbyistes c’est non seulement rater la définition du « lobby » mais aussi perdre une occasion de taire son ignorance du sujet. Certes les anti-corrida ont des fois des manières brutales de défendre leur cause mais il ne faut pas se concentrer autant sur ces manières et jusqu’à oublier où sont la vraie violence, la vraie brutalité et les vrais crimes . Au delà de tout soi-disant lobby, il y a la cruelle réalité : et la réalité c’est que, quels que soient les mots et l’idéologie exprimés, le taureau est tué à force de blessures. Vous pouvez appeler cela art ou torture, ce qui compte c’est le vécu du taureau et son vécu, pour peu que l’on soit objectif, ne peut pas être dit enviable : il meurt à se faire transpercer de tous les côtés.

Une autre preuve du spécisme criant de R. Enthoven c’est le terme « bêtes » qu’il utilise pour définir certains des anti-corrida. Premièrement, je m’étonne qu’une revue assez connue (non pas pour sa qualité, mais bon) accepte la publication d’un terme qui pourrait être ressenti comme l’insulte qu’il est. Deuxièmement, je m’étonne (à moitié) qu’un prétendu connaisseur de la philosophie soit aussi enclin à utiliser des mots qu’il serait dans l’incapacité de définir. En effet, la « bêtise » n’est qu’un mot qui ne recouvre que l’incapacité de l’observateur à voir l’étendue d’un acte. Troisièmement, le terme « bête » ne devrait pas être utilisé comme une insulte dans le sens où il pourrait être synonyme d’animal. Or, jusqu’à la preuve du contraire, et dans une vision non-anthropocentrique, c’est à dire dans une vision intellectuellement ouverte et objective, être un « animal » n’est pas un défaut mais un état que beaucoup d’êtres, y compris R. Enthoven, partagent.

Il n’y a pas de désapprobation « imaginaire » de la corrida, sauf pour ceux qui contestent aux sondages toute légitimité et à la démocratie toute valeur.

Oui, bon, le fin philosophe a cru déceler une incohérence psychologique entre ce que les anti-corrida dénoncent et ce qu’ils font. En même temps, je voudrais bien vous voir, vous, dénoncer un acte sans forcément le montrer ou le qualifier. De plus, si mes yeux ne me trompent pas, la photo de votre plaidoirie même montre un taureau ensanglanté. Comment expliquez-vous cela ?

Dans l’ensemble, cet article n’a aucune teneur philosophique et morale. Normal, me diriez-vous, chers lecteurs avisés, il est publié dans l’Express. Mais permettez-moi de vous contredire : je crois que vous vous trompez : ce n’est pas parce qu’il est publié dans l’Express qu’il n’a aucune teneur philosophique et morale, mais c’est seulement parce que son auteur n’en a pas sur ce sujet. Il a bien voulu se défendre mais il s’est enfoncé car clairement il ne voit pas puisqu’il ne regarde que ce qui l’intéresse. J’aimerais dire que vous avez entaché la philosophie, R. Enthoven, mais il ne me semble pas logiquement possible de l’affirmer car on ne peut entacher ce qu’on n’atteint pas.

Pour finir, une dernière petite incohérence dans votre article trouble et confus : « […] la cause qu’ils ont peut-être raison de défendre ». Au début, c’était une cause noble, maintenant elle est « peut-être » défendable ? Décidez-vous car il me semble que c’est contradictoire. Mais vous n’êtes sûrement pas à ça près, n’est-ce pas ?

Débat « Tuer les animaux humainement » sur Ovs

Bonjour à tous

Je vous mets ici, à télécharger en appuyant sur le lien, un débat que j’ai lancé sur un forum Ovs : http://dl.dropbox.com/u/92596596/v%C3%A9ganisme/d%C3%A9bat%20tuer%20les%20animaux%20humainement.pdf

La secte des végans – entretiens

Vous pouvez télécharger l’article en format pdf en appuyant sur le lien suivant : http://dl.dropbox.com/u/92596596/v%C3%A9ganisme/la%20secte%20des%20v%C3%A9gans.pdf

 

Les connaisseurs et les initiés l’appellent Consortium Herboricus Animatus Revolutiam Animalis Latifundia (CHARAL) ou, plus couramment, Immanatus Naturalis Revolutiam Animalis (INRA). Mais elle est connue par le grand public sous le nom de Secte des végans. J’ai eu l’occasion de rencontrer certains membres ainsi que leur gourou suprême. Comment vivent-ils ? Que pensent-ils ? Que rêvent-ils ? Immersion.

Première discussion. Un membre un peu… rapide.

C.B. : – Bonjour.

– Bonjour.

C.B. : – Comment vous appelez-vous ?

– Quantum Unitum Internatum Corpoream Kalus (QUICK).

C.B. : – Depuis combien de temps faites-vous partie de la secte ?

QUICK : – Depuis 1971.

C.B. : – Qu’est-ce qui vous a attiré et décidé de la rejoindre ?

QUICK : – La profondeur de ses vues.

C.B. : – Pouvez-vous m’en dire plus ?

QUICK : – Nous, c’est le goût, le goût pour la profondeur qui nous anime.

C.B. : – Quelle profondeur ?

QUICK : – La profondeur de nos vues.

Je n’en saurai pas plus.

Deuxième discussion. Un membre… tel quel.

C.B. – Bonjour.

– Bonjour.

C.B. : – Comment vous appelez-vous ?

– Marginalus corpus Detrimentus Oblicus (McDO).

C.B. : – Depuis combien de temps faites-vous partie de la secte ?

McDO : – Depuis 1955.

C.B. : – Qu’est-ce qui vous a attiré et décidé de la rejoindre ?

McDO : – Je me suis toujours senti rejeté par mon entourage. Un jour, j’ai entendu qu’il y avait une secte qui était très ouverte d’esprit. D’ailleurs, l’une de ses devises c’est « Venez comme vous êtes ». C’est ce qui a touché la corde sensible de ma marginalité.

C.B. : – Et votre impression s’est confirmée ?

McDO : – Oui, maintes fois. Nous sommes très unis, très solidaires. Je n’ai qu’une chose à dire : c’est tout ce que j’aime !

Troisième discussion.

C.B. : – Bonjour.

– A vous de même.

C.B. : – Comment vous appelez-vous ?

– Drasticus Agrus Nullus Ordinarus Necrofilus Erectus (DANONE)

C.B. : – Depuis combien de temps faites-vous partie de la secte ?

DANONE : – Depuis 1919.

C.B. : – 1919 ??? Qu’est-ce qui vous a attirée et décidée de la rejoindre ?

DANONE : – Son côté maternel. J’ai eu deux enfants que j’ai allaités moi-même. Dans mon entourage on me disait que c’était démodé, qu’il fallait acheter le lait etc. Je n’ai pas voulu car je désirais avoir une relation forte avec mes enfants. Le lait d’une mère c’est la vie. Pour moi, les produits laitiers vendus dans le commerce sont nos ennemis pour la vie. Aussi ai-je défendu à mes enfants d’en consommer et du coup ils sont en très bonne santé. La secte avait la même approche que moi sur le sujet et j’ai donc décidé de la rejoindre.

Je vais prochainement interviewer le gourou suprême de la secte. On me fait d’abord attendre (3 heures car le gourou est en pleine méditation transcendantale, me dit-on). Le lieu est sobre, vert à volonté. Il sent le naturel. Des animaux divers passent et repassent. Je vois une gazelle et un lion jouer ensemble. Je vois un chat servir le thé à une souris. Je vois les fourmis et les termites travailler ensemble à la réparation d’une toile d’araignée. Araignée qui, elle, est en train de « réparer » l’aile d’une mouche en l’entourant de sa toile. D’un coup tous les animaux s’arrêtent et s’inclinent. On me prévient que le gourou est prêt.

C.B. : – Bonjour

– Effectivement, c’est un bon jour.

C.B. : – Comment vous appelez-vous ?

– Je ne m’appelle jamais.

C.B. : – Bon, je voulais dire, comment vous appelle-t-on ?

– On ne m’appelle pas, on m’invoque !

C.B. : – Enfin quel nom portez-vous ?

– Ah ! Il fallait commencer par là. Mon nom est Cosmologicus Infinitus Veganus (CIV).

C.B. : – Depuis combien de temps faites-vous partie de la secte ?

CIV : – Je ne fais pas partie de la secte, la secte c’est moi !

C.B. : – Quel rôle exact y détenez-vous ?

CIV : – Un rôle d’unificateur.

C.B. : – C’est donc vous qui avez créé la secte.

CIV : – Effectivement, c’est moi.

C.B. : – Pouvez-vous me donner des détails sur sa création ?

CIV : – Effectivement, je peux tout. Un jour j’étais allongé sous un pommier quand…

C.B. : – Oui, on connaît, une pomme vous est tombée sur la tête !

CIV : – Effectivement, c’est faux. C’est un brin d’herbe qui m’a piqué, comme s’il voulait attirer mon attention. Je me suis levé, je l’ai regardé et là j’ai compris.

C.B. : – Vous avez compris ?

CIV : – Effectivement, j’ai compris.

C.B. : – Oui mais vous avez compris quoi ?

CIV : – Tout.

C.B. : – Pouvez-vous détailler ?

CIV : – Effectivement, je peux. J’ai compris l’appel de l’herbe. Ce brin d’herbe, par sa douce pression, voulait me dire quelque chose. Je l’ai regardé attentivement et là j’ai compris. Ce brin d’herbe voulait me dire qu’il fallait s’élever, comme lui, vers les hauteurs. Donc que je devais changer ma vie, m’améliorer et améliorer le monde, l’élever. J’ai donc développé une théorie que j’appelle « théorie du brin d’herbe ».

C.B. : – En quoi consiste-t-elle ?

CIV : – Vous avez déjà regardé l’herbe ? Je veux dire, l’avez-vous vraiment regardée ? Elle est partout et elle reçoit tout le monde : noirs, blancs, hommes, femmes, chiens, chats, fourmis, vaches et ainsi de suite. Elle ne fait pas de préférences, elle ne fait pas de discriminations. Elle traite tout le monde de la même manière et lui offre tout ce qu’elle a. Elle protège la fourmi du vent, elle nourrit la vache, elle offre un doux lit aux humains. Elle est douce et tendre avec tous les êtres qui viennent lui rendre visite. On peut lui marcher dessus, elle ne dit mot et elle est même contente d’adoucir la marche. Ensuite, elle se relève, fière d’avoir soutenu un être dans son chemin vers le bonheur.

C.B. : – Je crois que vous parlez aussi de sa couleur ?

CIV : – Effectivement, j’en parle. L’herbe est verte, couleur qui symbolise l’espoir, l’espoir d’un monde meilleur, d’un monde plus doux où tous les êtres seraient traités avec une justice égale, un monde de solidarité qui remplacerait ce monde de compétition. D’ailleurs, ne dit-on pas « l’herbe est toujours plus verte dans le jardin du voisin » ? Pourquoi croyez-vous que l’on dit cela ? C’est une manière métaphorique de dire que l’espoir se trouve dans les bonnes relations que l’on a avec ses voisins, avec ses proches, avec tout le monde. L’espoir c’est dans la solidarité, dans l’attention que l’on porte aux autres : si on regarde attentivement son voisin, c’est à dire si on s’intéresse à lui de manière profonde, l’herbe devient plus verte car l’espoir d’un monde meilleur grandit. C’est celle-là la vraie signification de ce proverbe. Mais les gens ont oublié de regarder leurs voisins et ont oublié de regarder l’herbe.

C.B. : – Pourquoi les végans sont-ils appelés « Le peuple de l’herbe » ?

CIV : – Parce que justement nous essayons de nous inspirer de la sagesse herbeuse et vivre en harmonie avec tous les êtres. L’herbe aime et accueille tout le monde, elle considère tous les êtres comme ses égaux et elle se met à leur service quand ils ont besoin d’aide. Les végans doivent faire de même.

C.B. : – On dit souvent de vous que vous mangez de l’herbe…

CIV : – C’est une profanation ! On ne mange pas l’être que l’on aime. L’herbe, nous la respectons et c’est pourquoi nous tentons de ne jamais lui faire de mal.

C.B. : – Mais vous mangez bien d’autres végétaux. Eux, vous ne les aimez pas ?

CIV : – Si, on les aime, cuits ou cru, avec des épices ou sans etc. (rires sadiques). J’ai un jour interrogé l’herbe sur ce sujet. Je lui ai demandé s’il était juste de manger les végétaux, s’ils n’étaient pas tous ses enfants. Elle m’a répondu qu’ils l’étaient, effectivement. Mais qu’elle nous les offrait de manière gracieuse pour que nous puissions croître et nous développer.

C.B. : – Elle vous donne ses enfants à manger ???

CIV : – Ce n’est pas ce que vous croyez… Ses enfants sont faits pour nous, ils sont très heureux de nous satisfaire, c’est leur but dans la vie… Croyez-moi que si l’herbe nous l’interdisait, nous ne le ferions pas… Nous ne sommes pas des criminels !

C.B. : – Donc vous acceptez que les végétaux souffrent quand vous les coupez ! Le fameux cri de la carotte que vos détracteurs vous jettent à la figure n’est donc pas pur manque d’arguments !

CIV : – Effectivement, c’est un argument très profond et très pertinent. Mais la réalité est tout autre. Imaginez-vous avoir un but dans la vie, par exemple être journaliste ! Si vous le deveniez, vous seriez heureux, n’est-ce pas ?

C.B. : – Effectivement, mais je suis déjà journaliste.

CIV : – Effectivement. Donc, vous êtes heureux. C’est de même pour les végétaux : leur but dans la vie c’est de nourrir les êtres animaux que nous sommes. Ils en sont donc très heureux.

C.B. : – Vu comme ça… Je suppose donc que, puisqu’ils sont heureux, ils ne souffrent pas de se faire manger.

CIV : – Évidemment qu’ils ne souffrent pas, nous ne sommes pas des criminels !

C.B. : – Est-il vrai que vous marchez pieds-nus ?

CIV : – Effectivement, cela me permet d’avoir un contact direct avec l’herbe. Nous nous échangeons ainsi des informations importantes. Vous savez, la plante de nos pieds est très sensible et peut donc recevoir beaucoup d’informations. Quand je marche je suis ainsi constamment connecté à l’univers entier puisque l’herbe me transmet toutes les informations nécessaires. Imaginez-vous des milliards et des milliards de brins d’herbe qui, se transmettant les informations entre eux, vous les transmettent au moment-même où vous posez le pied sur certains… C’est un bonheur et une connaissance inestimable.

C.B. : – J’ai déjà marché pieds nus et je n’ai pas eu le même sentiment…

CIV : – Vous êtes végan ?

C.B. : – Non.

CIV : – Effectivement…

C.B. – Il faut être végan pour ressentir cette connexion à l’univers entier ?

CIV : – Certains végans ne la sentent pas car ils ne sont végans qu’en surface, de manière superficielle. Il faut avoir beaucoup médité et il faut surtout aimer tous les êtres d’un amour pacificateur et unificateur. Si vous avez de la haine en vous, l’herbe ne vous transmettra pas ses informations. Grâce à la méditation télékinésique transcendantalement immanente que j’ai développée, toute personne peut entrer en contact avec l’herbe, pour peu qu’elle le veuille.

C.B. : – J’ai remarqué que les initiales de votre nom, ainsi que celles de vos adeptes, sont identiques à celles des sociétés ou des organismes qui, non-connectés à l’herbe, exploitent tous les êtres sur cette planète, en premier lieu les animaux autres qu’humains. Est-ce un hasard ?

CIV : – Effectivement non. Il y a eu une époque où tout allait bien, tout le monde était heureux, c’était l’époque d’or du véganisme et le peuple de l’herbe vivait en harmonie. Mais des voix se sont élevées qui disaient qu’on pouvait encore mieux vivre en exploitant certains, donc en vivant à leurs dépens. Évidemment, j’ai refusé cette vision dominatrice et je les ai exclus. Pour brouiller les pistes et semer le trouble dans l’esprit des gens, ils ont repris des noms que certains de nos adeptes, moi y compris, portent et les ont utilisés pour des entreprises qui font tout le contraire de ce que nous prônons. C’est ce que l’on appelle un « coup de com’ »…

C.B. : – Vous en souffrez, vous êtes déçus ?

CIV : – Nous, pas trop. Mais les êtres exploités en souffrent beaucoup, énormément. Les informations que l’herbe me transmet sont tout simplement tragiques. Nous avons donc décidé de nous montrer pour rétablir la vérité, pour montrer le vrai sens des mots et faire en sorte que tous connaissent la réalité.

C.B. : – Oui, certains vous accusent de faire de la propagande et d’être sectaires…

CIV : – Effectivement, ils nous accusent. Mais c’est parce qu’ils ont été trop endoctrinés que la vérité les aveugle. Quand on a vécu dans le mensonge et dans le déni, il est très difficile d’accepter la vérité. C’est un effort assez important que de penser vraiment.

C.B. : – Que conseillez-vous ?

CIV : – Je conseille déjà de marcher pieds-nus dans l’herbe (non pas de l’écraser, de l’arracher, mais juste de la toucher et d’y faire attention). C’est la première étape pour se reconnecter à la nature, à la vérité, à l’herborisme. Ensuite, bien sûr, de venir à notre encontre, sans peur, sans réticence. Le peuple de l’herbe ne vous veut aucun mal. Notre secte vous ouvre les bras, vous ouvre le cœur et vous ouvre les yeux. Tandis que d’autres veulent uniquement vous faire ouvrir votre porte-monnaie, nous on veut vous faire ouvrir les yeux et le cœur. Nous n’avons rien à gagner personnellement. L’herbe nous comble suffisamment.

C.B. : – Croyez-vous être supérieurs aux autres ?

CIV : – Le peuple de l’herbe se sent l’égal de tous les êtres. C’est parce que nous sommes leurs égaux que nous ne voulons pas exploiter les autres animaux. Mais ceux qui les exploitent, se sentent justement supérieurs à eux. C’est parce qu’ils n’ont plus de connexion avec l’herbe…

C.B. : – Certains disent que vous êtes extrémistes.

CIV : – Extrémistes parce que nous refusons catégoriquement de faire du mal… Effectivement, nous ne sommes pas extrémistes mais extrêmement éveillés.

C.B. : – N’est-ce pas un peu prétentieux de dire cela ?

CIV : – Êtes-vous maître en méditation télékinésique transcendantalement immanente ? Non ? Alors vous ne pouvez pas comprendre. Goûtez la méditation, touchez l’herbe et vous sentirez la vérité frôler votre être entier dans une espèce de pénétration profondément intense et cosmologiquement totalisante.

C.B. : – N’est-ce pas un peu facile de dire cela ?

CIV : – Non, il faut bien répéter avant !

C.B. : – Où trouvez-vous les protéines ?

CIV : – Où trouvez-vous vos questions ?

C.B. : – Pouvez-vous me décrire vos rites, si vous en avez ?

CIV : – Nous sommes allongés en forme de cercle sur l’herbe, entièrement nus et couverts de végétaux verts. Il se forme plusieurs cercles concentriques. Au centre, bien évidemment, un cercle d’herbe. Un adepte, nu lui aussi, verse sur nous, en commençant par le cercle le plus grand, une boisson végétale formée de soja, de riz, d’amande et de blé. Il dit, et nous après lui, « Vitam Eternam Gaba Abolitiam Nulitates » (VEGAN). Son chant doit être envoûtant, les adeptes doivent perdre le contact avec le reste de l’univers pour ne se concentrer que sur le contact avec l’herbe imbibée de boisson végétale. Tous les adeptes de chaque cercle accrochent leur index gauche à l’orteil droit de l’adepte suivant (c’est ainsi que l’énergie télékinésique spirituellement immanente et matériellement substantielle se transmet d’un adepte à l’autre). Le chant et le versement de la boisson végétale transationnelle durent 30 minutes, c’est le temps exact calculé par moi nécessaire à une connexion universelle totale. A 30 minutes l’union végane est à son maximum, chaque cellule de notre corps est connectée à chaque cellule du corps des autres, nous ne formons plus qu’un. L’harmonie est totale, nous sommes envahis par un tel sentiment de force et de bien être incomparable à un autre. C’est à ce moment-là que les animaux non-humains présents rentrent eux aussi dans le « jeu » en s’unissant les uns aux autres comme suit : chaque animal s’unit à son prédateur classique dans une abnégation totale. Leur intervention est d’autant plus forte qu’ils semblent être des ennemis nés. Mais la cérémonie prouve qu’il n’en est rien, que les animaux s’aiment tous et que leur férocité n’est qu’une invention de nos opposants. Nous attendons encore 30 minutes pour que tous les animaux soient unis dans l’harmonie, la boisson et l’herbe. A cet instant je me jette au milieu et je commence à embrasser chaque brin d’herbe du cercle. Au moment où tous les brins d’herbe sont humidifiés par ma salive télékinésiquement dématérialisée ils se connectent entre eux et de cette union des humains, des non-humains et de ma salive éclate une lumière profonde qui se perd dans l’abîme du ciel étoilé. L’émotion est alors à son comble et tous les êtres ne font plus qu’un, pour de bon. C’est à ce moment que nous ressentons le plus intensément ce qui nous unit profondément. L’émanation de lumière dure 10 secondes qui pour nous sont équivalentes à une éternité de bonheur. Une fois la lumière disparue, nous nous évanouissons tous dans un cri de libération absolu et nous dormons pendant 10 heures. Au réveil nos yeux pétillent, nous avons atteint le nirvegana.

C.B. : – Vous voulez dire le « nirvana » ?

CIV : – Non, le nirvegana, le nirvana est un concept copié sur le nôtre. Mais, dites-moi, vous avez les yeux qui pétillent vous ?

C.B. : – Je dois avouer que j’ai été transporté… Je vous remercie, en tout cas, de m’avoir accordé cet entretien enrichissant. Que me conseillez-vous pour la suite ?

CIV : – Faites attention à l’herbe.

Je me précipite à partir car mon émotion, trop grande, me rend faible. Mais c’est sans aucun doute d’avoir ressenti toute cette force que je me sens faible. La secte des végans, une secte envoûtante qui nous transporte…

Discriminations et cause animale : la banalisation de l’inacceptable

Pour télécharger le fichier pdf appuyez ici Discriminations et cause animale : la banalisation de l’inacceptable

La cause animale (au sens large) prend de l’ampleur en France. Il est donc logique que de plus en plus de personnes la rejoignent. En principe, c’est une bonne chose. Mais seulement en principe, car le nombre n’est jamais gage de qualité ou de valeur. En pratique, il se trouve que dans la cause animale il y a des personnes de toutes les sensibilités politiques. Beaucoup de malentendus et de conflits sont donc nés suite à cette diversification des militants. Généralement, ces malentendus et conflits sont dus à une compréhension limitée de ce que sont l’antispécisme ou le véganisme et de ce qu’il faudrait faire pour rendre justice aux animaux autres qu’humains. Je vais donc passer en revue quelques raisons qui freinent le bon déroulement de cette noble lutte et aussi décrire certains concepts pour mieux en saisir les différences et les similitudes. Cela, je l’espère, évitera à certains de s’embourber dans des « débats » sans fin.

  1. La Protection Animale (P.A.)

On appelle généralement «protection animale » un combat qui a pour volonté et pour but de diminuer les souffrances des animaux exploités par les humains. Ainsi, les partisans de la « protection animale » souhaitent que soient interdites toutes les pratiques qui font souffrir « inutilement » les animaux. Il y a, entre autres, la castration à vif, le foie gras, les transports trop longs, la corrida et ainsi de suite. Mais sont tolérés les élevages « respectueux » des animaux et les façons de tuer « humaines ». Sur quelle base ces critères sont décidés, personne ne le sait. Mais, en tout cas, ces critères ne sont pas particulièrement bénéfiques aux animaux puisque ceux-ci peuvent quand même se faire exploiter et tuer. Ainsi, la « protection animale » permet l’exploitation et la mise à mort des animaux mais souhaite que ces actes se fassent avec délicatesse et tendresse…

  1. Le welfarisme (ou le bien-être)

Le « welfarisme » est une théorie qui, appliquée à la cause animale, sonne ainsi : « il faut, pour les animaux et par respect pour eux, des cages plus grandes et des chaînes plus longues ». Le « welfarisme » est ainsi l’idéologie qui est à la base du combat appelé Protection Animale. Pour les welfaristes les animaux sont naturellement à notre service et il est justifié de les exploiter et les tuer, mais non pas de les torturer. Les welfaristes ne souhaitent aucunement la fin de toute exploitation des animaux mais seulement une modification du système de telle sorte que les pratiques supposées les plus cruelles soient réduites ou abolies. Pour le welfarisme, les animaux sont nos esclaves mais nous devons être pour eux des maîtres bienveillants.

  1. L’abolitionnisme

Dans le cadre de la cause animale, est « abolitionniste » une théorie qui affirme que les animaux ne nous appartiennent pas, que nous n’avons aucun droit à les exploiter ou tuer et que, par conséquent, toute pratique portant atteinte à leur intégrité physique ou psychique devrait être abolie. Pour les abolitionnistes, il ne doit y avoir aucune chaîne ni aucune cage et les animaux doivent jouir de la même liberté dont jouissent normalement les humains.

  1. L’antispécisme

Le « spécisme » est une théorie qui affirme qu’il y a des espèces par nature supérieures en valeur morale à d’autres espèces. Généralement, l’espèce humaine est placée en haut de la pyramide des valeurs. Viennent ensuite, pour les occidentaux par exemple, les chiens, les chats, les chevaux, les lapins et ainsi de suite. Plus une espèce est exploitée, plus elle est positionnée bas sur l’échelle des valeurs (étrange paradoxe n’est-ce pas ?). Ainsi, est spéciste non seulement celui qui affirme que les humains ont plus d’importance que les autres animaux, mais aussi celui qui affirme que les chiens sont plus importants que les cochons ou que les chevaux sont plus importants que les poulets. Quelqu’un qui caresse « son » chien tout en plantant sa fourchette dans une chair animale a un comportement spéciste. Donc, l’antispécisme est une théorie qui s’oppose à cette discrimination et à cette hiérarchie. L’antiracisme s’oppose à des discriminations injustifiées parmi les humains et l’antispécisme s’oppose à des discriminations injustifiées parmi les autres animaux ou entre les humains et les autres animaux.

  1. La sentience

Est « sentient » un être qui a des sensations physiques (douleur, soif, faim, froid, plaisir…) et psychologiques (stress, peur, espoir, tristesse, sentiment de solitude, joie, souffrance…). Ainsi, tous les individus animaux doués de sentience seront appelés « êtres sentients ». Ces êtres, de par leur constitution inhérente, ont des intérêts (intérêt à ne pas souffrir par exemple, ou bien intérêt à disposer de leur corps).

  1. Le véganisme

Le « véganisme » est une théorie morale qui affirme que tous les êtres sentients sont égaux en droits fondamentaux (droit à la vie, à la liberté, au bonheur ou au bien-être, au respect de leur intégrité physique et psychique, à ne pas être la propriété de quelqu’un). Originellement, le « véganisme » décrivait le comportement des « végans » c’est à dire des personnes qui boycottaient toute entreprise ou institution qui exploitait ou tuait les animaux autres qu’humains. Il devient de plus en plus évident qu’on ne peut séparer de manière catégorique et logique le monde des animaux humains et celui des animaux autres qu’humains. Les humains sont eux aussi des êtres sentients et, à ce titre, ils méritent que leurs droits soient tout autant respectés que ceux de tous les autres animaux sentients. Il n’y a aucune raison de mettre les humains à part, à moins de vouloir tomber dans le spécisme… Tous les animaux sentients sont différents les uns des autres, mais il n’y a là aucune raison de tracer des frontières arbitraires et discriminatoires. Est donc spéciste aussi celui qui, pour une raison ou pour une autre, placerait une espèce animale autre qu’humaine au dessus de l’espèce humaine. Le véganisme considère les êtres sentients comme des individus à part entière qui doivent être traités à égalité, quelle que soit l’espèce à laquelle ils appartiennent. Puisque tous les individus sentients doivent être traités avec le même respect de leurs droits fondamentaux, il est incontestable que tous les humains sont égaux en droits fondamentaux. L’homophobie, le sexisme, la xénophobie, le racisme et toute autre discrimination arbitraire et injustifiée vont donc à l’encontre du véganisme. On ne peut être véritablement végan si on discrimine intentionnellement des groupes d’êtres sentients et ce, quelles qu’en soient les raisons ou les justifications. Toute discrimination arbitraire et injustifiée dirigée contre un individu sentient est une atteinte au véganisme. Ainsi, toute personne ou association qui se complaît dans une attitude discriminatoire ou bien qui la propage lutte en fait contre le véganisme, qu’elle le veuille ou non.

  1. La politique et la cause animale

Le terme « politique » vient du Grec polis qui signifie « ville ». Ainsi, au sens premier, la politique c’est ce qui concerne la vie dans la ville. Par extension, la politique concerne la vie des citoyens d’un État. La vie des citoyens dans un État est réglée, en principe, par des lois choisies par les représentants du peuple (dans le cas des démocraties). Ces lois concernent tous les aspects de la vie : l’éducation, la culture, la sécurité, le travail, les transports, la santé… Mais elles concernent aussi, et quoi qu’en disent ceux qui « ne sont là que pour les animaux et ne font pas de politique », la vie (et la mort…) des animaux dans l’État. La loi, créée par des représentants du peuple, autorise ou interdit certaines pratiques dont les animaux sont les premières victimes. Elle autorise, par exemple, grâce à une belle entorse, la corrida. Elle autorise aussi les élevages, les abattoirs, l’expérimentation animale et, pour cette dernière, elle l’exige même pour les médicaments. Les animaux vivent donc, du début et jusqu’à la fin de leur pauvre vie sous le joug de la loi humaine. Les militants de la cause animale veulent l’interdiction de la corrida ou de l’expérimentation animale. Cette interdiction n’est-elle pas obligée de se faire par la loi ? La loi n’est-ce pas principalement de la politique ? On le sait bien, tout ce qui n’est pas interdit par la loi, est autorisé. Ainsi, si la loi n’interdit pas la corrida, qui pourra l’interdire ? Il ne faut pas se leurrer… Vouloir changer la condition des animaux c’est aussi vouloir changer les lois qui les oppriment. Écrire une pétition à je ne sais quel ministre ou faire des campagnes du style « En 2012 les taureaux voteront » mais dire, de l’autre côté, que la politique n’est pas notre affaire car nous ne sommes là que pour les animaux c’est, au mieux, de l’ignorance, au pire de la mauvaise foi. La cause animale est politique, que cela plaise ou non.

Et c’est là que le problème s’approfondit. La politique concerne les animaux autres qu’humains mais concerne aussi les animaux humains. Par exemple, la plupart des partis politiques s’occupent de tous les domaines de la vie des citoyens mais aussi des animaux vivant à notre service. Il est ainsi rare qu’un parti politique ne s’occupe que d’une cause, disons, par exemple, que de la culture, que de la sécurité ou que de la cause animale. La plupart des partis ont une vision d’ensemble, plus ou moins cohérente, qui a la prétention d’englober toute la vie en société. Ainsi, cautionner un parti seulement parce que sur un sujet donné il nous semble correct voire très avancé, tout en ignorant le reste de son idéologie peut, au moment venu, se retourner contre nous et contre tous ceux qui n’y sont pour rien. Il y a sûrement dans tous les partis de bonnes idées et des personnes honnêtes. Mais il faut aussi, et principalement, regarder l’ensemble : l’idéologie du parti est-elle acceptable dans l’ensemble ou bien seulement par certains points précis ? Cette idéologie est-celle compatible avec certaines idées du parti qui ne semblent pas coller à l’ensemble ? Pour prendre un exemple très simple, ce n’est pas parce qu’un parti s’oppose au halal qu’il s’intéresse particulièrement aux animaux. Il faut regarder son programme en entier, car, une fois au pouvoir, c’est bien ce programme (normalement) que le parti appliquera. Alors, s’il est contre le halal, mais pour la chasse, la corrida ou la vivisection, contre l’avortement et pour la diminution de la liberté d’expression, pour la diminution des moyens attribués à l’éducation et ainsi de suite, il faut peut-être se poser la question deux fois de savoir s’il est bien de le soutenir. Il y a des partis qui, de manière démagogique, font semblant d’être concernés par un sujet de société qui touche beaucoup de citoyens mais, au fond, ce n’est là qu’une manipulation de plus. Seul l’ensemble compte dans ce cas, on ne choisit pas un parti malgré ses « mauvaises » idées sur tant de sujets juste parce qu’il a une seule bonne idée. Il y a des partis qui ont un projet d’ensemble qui est cohérent et viable, pourquoi ne pas se tourner vers eux ? Et si ces partis n’existent pas, il faut les créer mais non pas faire de si gros compromis avec des partis qui ne sont viables que sur un point ou deux.

Entre les humains et les autres animaux il n’y a qu’une frontière arbitraire. Tous les partis qui sont prêts à opprimer les humains, seront d’autant plus prêts à opprimer les animaux car ce n’est pas là une question d’espèce mais une question de respect de tout être sentient parce qu’il est un être sentient. On ne me fera pas croire que les membres d’un parti prêt à discriminer, chasser et haïr des êtres qui font partie de leur propre espèce se mettront à défendre les cochons, les chiens ou les vaches. Si on n’a aucune sensibilité envers ses congénères, comment pourrait-on en avoir envers des êtres d’une autre espèce ? La haine c’est la haine, et celui qui la ressent ne fait pas vraiment la distinction. Par quel miracle un misanthrope aimerait-il les animaux ? Il y a des gens qui disent aimer les animaux et détester les humains mais cela relève plutôt d’une énorme déception et d’une redirection de leurs sentiments. Certains n’aiment les animaux que par dépit des humains. Or cela n’est pas un vrai amour qui est un amour de substitution. On dit souvent que l’on n’a pas deux cœurs, un pour les humains et un autre pour les animaux. Cela va aussi dans l’autre sens. Les humains sont des animaux et celui qui n’a pas de cœur pour les humains n’en aura que très difficilement pour les animaux.

  1. La cohérence morale dans la cause animale

Ne nous leurrons donc pas, le véganisme est une lutte contre la domination et le mal que subissent les plus faibles, une aspiration à plus de justice pour tous les êtres sentients. A des moments, ce sont les humains qui sont dans le camp des faibles et des opprimés. Rien ne justifie d’être indifférent à cela sous prétexte que l’on défend les animaux. La souffrance c’est la souffrance, peu importe l’être qui la ressent. On ne peut être indifférent à la souffrance d’un humain sans devenir froid envers tout être sentient.

Animaux humains et non-humains, c’est le même combat qu’il s’agit de mener. Un combat contre toutes ces structures qui broient les êtres, un combat contre tout ce malheur intentionnellement provoqué, un combat contre ce qui empêche chaque être sentient de s’épanouir. En cela, nous sommes tous égaux et l’espèce n’a aucune pertinence. Ce qui compte c’est notre qualité d’être sentient.

Ainsi, ceux qui divisent arbitrairement les êtres entre ceux qu’il faudrait défendre et ceux envers lesquels on peut être indifférents n’ont pas compris le sens de ce combat et sont encore dans la haine de quelque chose. Pour eux, « défendre » les animaux n’est souvent qu’une justification de leur haine des humains. Or il n’y a aucune justification pour haïr les humains dans l’ensemble et encore moins ceux qui appartiennent à un peuple ou à une ethnie différents des nôtres. La cause animale ne doit pas être le camouflage de la haine des humains. On peut s’employer à défendre les animaux sans s’employer à défendre les humains (notre temps et notre énergie sont limités). Mais on ne peut pas défendre les animaux et accepter l’oppression des humains. Ceux qui font cela appliquent ni plus ni moins un principe discriminatoire en fonction de leurs préférences personnelles, autant dire que tout ce qui les intéresse c’est seulement leur propre système de valeurs. C’est ce que l’on appelle être égocentrique, voire égoïste.

De plus, la cause animale doit envoyer aux humains un message de solidarité et d’opposition à toutes les formes de discrimination. On ne réussira jamais à aider les animaux si nous ne réussissons pas à attirer de notre côté beaucoup d’humains. Or, les idées racistes, xénophobes, homophobes et autres ne font qu’éloigner ceux qui pourraient adhérer à notre cause. Le reproche nous est vite fait de n’aimer que les animaux et de détester les humains. C’est ainsi que nous comptons attirer le plus de militants possible ? En fermant les yeux sur des discriminations et des idées absolument inacceptables ? La fin ne justifie pas les moyens. Elle ne les excuse pas non plus. Mais de toute façon, sans faire adhérer la majorité des humains à nos idées nous n’avons absolument aucune chance de bien aider les animaux. Et cette possible adhésion ne se fera jamais si nous faisons des compromis avec ce qui est inacceptable pour la morale commune. On dit qu’il y a environ 20% de racistes en France (je caricature un peu). Ne serait-il pas plus profitable de s’attirer la sympathie des autres 80% plutôt que de faire l’inverse ? Les potentiels défenseurs des animaux ne se retrouvent pas exclusivement parmi ceux qui ont des idées racistes, tout au contraire. Pourquoi alors, ne serait-ce que pour une question de stratégie (si on laisse de côté la morale), ne pas fermement condamner et exclure tout propos raciste de nos discours ? Préférons-nous sympathiser avec les 20% ? Est-ce stratégiquement raisonnable (encore une fois, je laisse de côté la morale) ? Non, évidemment que non. De même pour les discours homophobes. Le gouvernement autorisera le mariage et l’adoption pour les couples homosexuels. Les citoyens français sont majoritairement pour. Ne serait-il pas mieux de nous attirer la sympathie de cette majorité ? Vous voyez, quelle que soit la façon de regarder le problème, nous n’avons aucune justification ni aucune raison d’accepter des idées rétrogrades et discriminatoires à l’intérieur de cette noble cause. Mais attention, il ne s’agit pas d’exclure les gens de manière arbitraire, mais seulement de bien définir le cadre et les limites de notre lutte pour éviter tout compromis et tout flou possible. Certains disent qu’il faut aller vers ce qui fait consensus : eh bah, ce qui fait consensus c’est qu’il est moralement inacceptable de discriminer les gens en fonction de leur couleur de peau, de leur culture, de leur sexualité et j’en passe. Si vous voulez faire un consensus, le voilà. Et tout cela, c’est de la politique, nos idées et nos comportements concernent la vie en société, donc la politique. Ce n’est pas une opinion, c’est un fait.

Alors, au-delà de nos différences, il faut nous unir pour que ce monde soit meilleur pour tous et pas seulement pour ceux qui nous intéressent personnellement. Tous les êtres sentients, qu’ils soient ou non aimés par notre « moi », ont le droit à la considération égale de leurs vies et de leurs intérêts. Il faut exclure de la cause animale tout propos et tout comportement propre à créer un monde pire que celui qui existe déjà. Toute discrimination, quel que soit le groupe discriminé, est propre à créer un monde pire que celui présent. Ainsi, tout soutien, acceptation ou indifférence à la discrimination doit être banni de la cause animale. Est en jeu non seulement la cohérence de notre combat, mais aussi le projet du monde nouveau que nous avons la prétention de porter.