Farid, le Français le plus cohérent

Vous vous rappelez de Farid Ghilas, cet homme qui, pour « s’amuser », a jeté un chat contre un mur. Son acte, filmé par un complice, a provoqué une indignation légitime qui, si on met de côté son racisme (si Farid avait été un blanc bourgeois de Neuilly, cela n’aurait pas provoqué autant de remous…) et son hypocrisie, a été bien normale. Pourquoi hypocrisie ? Qu’a fait Farid ? Il a fait ce qu’il avait envie, et il a fait cela pour son plaisir personnel, sans aucune nécessité vitale. Il a agressé un animal innocent sans aucune justification autre que son envie. Et c’est en quoi cet acte est cohérent avec la vie de Farid dans l’ensemble. Car que doit faire Farid dans l’ensemble ? Il doit acheter du cuir, des produits testés sur les animaux, il doit manger de la viande ou du lait et peut-être assister à des courses de chevaux. Toutes ces choses il les fait pour son plaisir, par envie. Et la conséquence de son plaisir c’est des centaines d’animaux torturés ET tués rien que pour lui. La question est : si Farid, pour son plaisir, fait torturer et tuer des vaches, des poulets, des chevaux… pourquoi n’aurait-il pas le droit de torturer lui-même un chaton ? Alors, en torturant ce chaton Farid est resté cohérent avec l’ensemble de ses actes. Contrairement aux centaines de milliers de gens qui se sont indignés pour le chaton tout en oubliant qu’eux mêmes, pour leur plaisir, faisaient tuer plein d’autres animaux. Ces gens-là sont incohérents car ils pleurent pour un chaton et font tuer d’autres animaux innocents. Mais Farid, lui, est cohérent car il fait du mal ET au chaton, ET aux poulets, ET aux vaches et ainsi de suite. Au lieu de le critiquer, donc, soit on prend exemple sur lui et on devient cohérent dans la nuisance soit on fait le contraire et on est vraiment cohérent dans la bienveillance, c’est à dire qu’on ne pleure pas pour en chaton en croquant dans un poulet…

 

Les bergers malades du loup – analyse d’une émission spéciste

 

http://www.franceinter.fr/emission-interception-les-bergers-malades-du-loup

 

Mon but n’est pas d’accabler ces personnes qui sont, de tout évidence, dans une grande souffrance. Je veux juste pointer certaines incohérences.

Les propos tenus dans cette émission sont spécistes. Le spécisme c’est une idéologie qui affirme que les êtres humains sont supérieurs aux autres animaux et qui se traduit dans le comportement (exploitation, meurtre) ou dans le langage (on n’utilise pas les mêmes termes quand on parle des humains ou des autres animaux : par exemple on dit qu’un humain fait l’amour par plaisir, alors qu’un autre animal fait l’amour par instinct ou par besoin ; ou bien on qu’une femme accouche alors qu’une vache « met bas »). Pour une définition plus détaillée, voir ici : https://mouvementvegane.wordpress.com/2012/02/27/definition-de-quelques-termes-de-la-cause-animale/

Remarque générale : les chiens qu’on entend ce sont forcément des chiens qui n’ont pas choisi leur sort, dont on se sert et que l’on met en danger (ce sont eux qui sont censés attaquer les loups).

Min 1 : « Ces «éleveurs et ces bergers sont les premières victimes du loup ». Non, les premières et les vraies victimes du loup sont les brebis, qui risquent leur vie. Mais ces brebis sont d’abord les victimes des humains, qui tuent bien plus de brebis en une journée que tous les loups en un an…

Min 4 : « Ça nous a coûté trois brebis et cinq agneaux quoi. Que des brebis pleines avec des agneaux dans le ventre… ». On a affaire ici au langage : on dit que la brebis est « pleine » alors qu’on ne dit pas vraiment ça d’une femme. La brebis est enceinte, tout comme une femme, puisque biologiquement, elle porte son bébé dans son ventre. Ainsi, on utilise un autre langage pour faire croire que le fait n’est pas le même alors que rien ne justifie, biologiquement parlant, cette différence de langage.

Min 8 : « Quand t’as une brebis qui est au tapis ce n’est pas un billet de 100 euros qui est par terre, quoi, c’est une brebis avec son historique… ». Déjà, comparer la brebis à un billet de banque, même pour dire qu’elle n’est pas que ça, est purement et simplement spéciste : cet être est d’abord considéré comme une marchandise. Ensuite, le terme « historique » est peut-être mal choisi, mais on ne dit jamais d’un humain « avec son historique » (sauf pour les crimes ou les problèmes qu’il pose, parlant là de ses actes passés) mais avec son « histoire » : les animaux, les brebis ont une histoire car ils ont une mémoire et une place unique dans leur groupe. Le propre du spécisme c’est de nier la dimension historique (pour le coup) des autres espèces animales. Les animaux aussi ont une histoire et leurs espèces connaissent des évolutions.

Min 11 : « [les bêtes] pour moi c’est comme si c’était mes enfants, les bêtes pour nous c’est des choses qui sont, qui sont, qu’on y est attaché, on soigne ça comme nos enfants quoi ». Je ne pense pas que la personne qui dit ça vende ses enfants à des abattoirs pour qu’ils finissent découpés en morceaux sur des étalages… Cette personne ne prend pas la mesure de ses propos. Ensuite elle dit « c’est des choses »… On n’entendra jamais quelqu’un sain d’esprit dire « pour moi, mes enfants c’est des choses qui sont, qu’on y est attaché… ». Les enfants n’ont pas de prix, les brebis, si ! Donc elles sont traitées d’abord comme des marchandises et leur volonté ne compte pour rien car les humains décident de leur destin. Ce n’est pas cela le respect.

Min 16 : « leur outil de travail a été détruit ». La journaliste parle ainsi des brebis… Cela en dit long sur l’idée que cette personne se fait des brebis. On ne dirait jamais ça d’un professeur dont les élèves ont été pris en otage et tués… Encore une fois, les brebis ne sont que des instruments à la disposition de la volonté et des besoins des humains.

Il serait donc judicieux que ceux qui écoutent cela mais surtout ceux qui font profession réfléchissent sérieusement à leur cohérence et au respect que nous devons aux brebis (et aux autres animaux). Ces gens se plaignent du loup, mais font-ils mieux ? Sont-ils là pour protéger les brebis ou bien pour mieux les tuer ? Si les loups tuent, c’est surtout parce qu’ils n’ont pas le choix. Ce n’est pas le cas pour les humains, qui peuvent choisir une autre vie que celle faite d’exploitation et de meurtre. Les belles paroles ne suffisent pas. Il ne suffit pas de dire qu’on les soigne « comme » si elles étaient nos enfants, alors qu’on les envoie à la mort pour quelques dizaines d’euros… pour justement nourrir nos enfants… Cohérence, cohérence ! Nous, on aime nos enfants, les brebis aussi, les autres animaux aussi. Laissons-les vivre.

Nous sommes tous des Jan Fabre (en pire)

Vous avez sûrement entendu parler de cet artiste (je ne mets pas de guillemets car je n’ai pas les compétences pour juger de son talent), Jan Fabre et de son fameux « Lancer de chats ». Beaucoup de personnes se sont indignées à juste titre que l’on puisse, au nom de l’art, maltraiter des animaux innocents. L’artiste a même été agressé et a reçu beaucoup de menaces, à tel point qu’il est placé sous protection policière. Je n’approuve pas l’agression et les menaces. Mais elles montrent une chose : la sensibilité des citoyens quant au sort réservé aux animaux, les chats en l’occurrence. Cette sensibilité, cette attention portées à des êtres sans défense sont tout à l’honneur de ceux qui les ressentent. Il est absolument inadmissible de faire du mal à un être de manière intéressée et gratuite. Que l’excuse soit financière, artistique, religieuse ou je ne sais quoi d’autre, les citoyens ont bien raison de ne pas accepter que la folie et l’indifférence des uns soient payées par le malheur des autres…

Pourtant, je voudrais attirer votre attention sur un point fondamental. Il y a ce que Gary Francione a appelé une « schizophrénie morale ». Qu’est-ce à dire ? C’est cette tendance qu’a la plupart des citoyens de s’indigner de la maltraitance subie par certains animaux (chiens, chats, chevaux, bébés phoques, éléphants…) tout en soutenant une maltraitance institutionnalisée (toutes les industries qui s’enrichissent en exploitant les animaux). En pratique, c’est être horrifié par le « lancer de chats » de Jan Fabre tout en mâchant un bout de steak de vache. La schizophrénie morale est cette tendance à considérer, d’un côté, certains animaux comme « nobles » et devant être défendus et respectés et, d’un autre côté, certains autres animaux comme destinés à être exploités et tués. Il est normal de respecter un chat mais il est tout aussi normal de manger une vache. Il y a une scission morale dans la vision que nous nous faisons des animaux. Qu’est-ce qui justifie ce parti-pris ? Rien à part notre intérêt personnel et la culture que nous subissons et créons.

Alors, chers amis indignés par le « lancer de chat », n’oubliez pas que vous financez (c’est à dire que vous payez des gens pour faire le sale boulot à votre place) une industrie qui broie plus d’un milliard d’animaux par an, et cela rien qu’en France. Quelle différence y a-t-il entre vous, qui payez les professionnels de la viande, du cuir, du lait, des œufs (entre autres) et Jan Fabre qui paie des gens pour lancer les chats en l’air ? Nous c’est pour manger ou pour s’habiller, me direz-vous, en affirmant par cela que ce que vous faites est nécessaire alors que ce que fait Jan Fabre est inutile et gratuit. Mais vous savez bien que l’on peut vivre (et même mieux vivre) sans manger des substances animales. On peut, de même, vivre sans cuir ou sans cirques avec des animaux. Alors, si on peut vivre sans tout cela et que vous continuez malgré tout à payer des gens pour qu’ils tuent des animaux, vous payez une violence et une mort gratuites au nom de votre palais gustatif, de votre aspect vestimentaire ou de vos loisirs. Jan Fabre paie au nom de l’art. Entre l’art et la basique pulsion de se nourrir, je crois que l’art est plus noble, au fond.

Nous avons raison de nous opposer à ce que Jan Fabre a fait faire. Mais il faut aller plus loin et reconnaître que nous faisons bien pire en finançant les industries qui exploitent et tuent les animaux. Certes, ce que nous faisons faire n’est pas filmé ou n’est pas dans un but de promotion personnelle (quoique…) mais le résultat est pire car les animaux que les industriels tuent sont maltraités tous les jours de leur existence et finissent dans des lieux sombres qui portent bien leur nom, des abattoirs. Jan Fabre est coupable, mais avec lui nous le sommes tous. Jan Fabre vient d’une société qui accepte tacitement (et encourage directement) l’exploitation et le meurtre de milliards d’animaux qui sont tout aussi innocents et vulnérables que ces pauvres chats lancés en l’air. Ainsi, avant de lancer des accusations en l’air, retournons notre regard critique vers nous-mêmes et voyons s’il n’y a pas là aussi quelque chose à remettre en cause. Allons au bout de notre raisonnement et de notre indignation : si nous refusons une violence gratuite envers des chats, pourquoi l’acceptons-nous envers d’autres animaux ? L’excuse de la culture ne tient pas car cela n’empêche pas les animaux d’avoir mal. L’excuse de la nourriture ne tient pas non plus, car il est prouvé que nous n’avons aucun besoin de substances animales, tout au contraire, elles sont nocives. Alors, quelle serait l’excuse ? Pour quelle raison objective défendons-nous les chats et massacrons les poulets, les vaches, les moutons, les cochons, les grenouilles, les lapins, les chevaux, les poissons  ?

Que nous le voulions ou non, nous sommes tous des Jan Fabre (en pire) et nous ne cesserons de l’être qu’au moment où nous cesserons de financer la destruction systématique des animaux. Nous lançons tous des animaux vers le couloir de la mort. Mettons un frein à cette catastrophe. Ne soyons plus les complices tacites d’un système tortionnaire et criminel. Devenons cohérents avec ce que nous pensons et ressentons.

Les autres animaux ont tout autant le droit à la vie et au respect que les chats. Ni plus, ni moins.