Parler n’est pas un crime mais s’en abstenir peut être une vertu

Sur Europe 1 Enthoven dit « Manger de la viande n’est pas un crime et s’en abstenir n’est pas une vertu ». On ne va pas lui demander : « n’est pas un crime pour qui ? Pour l’animal tué ? » car de toute façon il n’osera pas répondre.

Mais je voulais juste me demander quelle était la différence entre l’enthoven et le philosophe ?

L’enthoven est un animal de la même espèce que le bhl, le finkielkraut ou le zemmour. Il est blanc, a la peau lisse, des cheveux bruns. Il a deux yeux, des dents blanches et une bouche. La bouche lui sert généralement à prononcer des mots pour s’écouter parler. L’enthoven fait cela grâce à son timbre de voix assez particulier, un timbre qui dit, en somme « attention, je dis des choses intéressantes » mais sans qu’il le fasse vraiment toujours. L’enthoven est un animal dominateur, il domine surtout les animaux plus vulnérables que lui et il les domine indirectement car il n’a pas le courage de les affronter en face à face : il paie des gens, de la même espèce que lui mais avec moins de diplômes inutiles, pour qu’ils dominent et tuent les animaux à sa place. Ensuite, l’enthoven se déplace avec son moyen de transport et achète des bouts de ces animaux préalablement tués pour lui. Il rentre enfin dans sa demeure et il prépare les bouts de cadavre pour ensuite les ingurgiter. Entre deux mastications de cadavre il pense à quel point il est cultivé, raffiné et différent des autres membres de son espèce qui eux aussi, en grande majorité, mangent des cadavres, mais qui, contrairement à lui, ne philosophent pas en les mangeant. Là est la différence essentielle entre l’enthoven et les membres de son espèce : il agit, moralement et pratiquement, de la même manière que plus de 90 % des humains mais il pense malgré tout être spécial, particulier, unique, différent, important…

Après avoir mangé du cadavre et philosophé sur la morale et la vie juste, l’enthoven s’endort la conscience tranquille (ou plutôt tranquillisée) de ne pas faire partie de l’espèce de ces véganes extrémistes qui voudraient (oh malheur !) que tous les animaux aient le droit à la vie et à la liberté. L’enthoven rêve ensuite d’être un grand philosophe qui marque son temps. Mais au réveil il se rend compte qu’il en est loin, cela le frustre terriblement de ne pas être grand et fort. Ayant oublié de se brosser les dents, il remarque qu’il a encore le goût du cadavre dans sa bouche. Et il se rappelle que si, il est fort, car il peut, rien qu’avec sa carte bancaire, commander la mort de plein d’individus sentients d’une autre espèce. Cela lui donne un peu de baume au cœur et lui fait dire que, finalement, il n’est pas si misérable que ça, en tout cas, qu’il est moins misérable que les poulets, cochons, vaches, poissons… dont il mange régulièrement le cadavre.

L’enthoven entame ensuite sa nouvelle journée pendant laquelle il fera semblant d’être pertinent et fin penseur.

À la différence de l’enthoven, le philosophe, lui, n’est pas suffisant et ne cherche pas à moduler le timbre de sa voix de telle sorte que l’on pense qu’il dit des choses intéressantes. Le philosophe est capable, contrairement à l’enthoven, de s’abstraire des préjugés de son temps, de prendre du recul par rapport à l’éducation qu’il a reçue voire même d’être un avant-gardiste sur différents sujets comme l’éthique par exemple. Le philosophe n’accepte pas de passer dans n’importe quelle émission médiocre seulement pour gagner de l’argent ou du prestige, il aime réfléchir par principe. Enfin, le philosophe ne recherche pas le buzz et n’a pas de raisonnements centrés uniquement sur sa personne.

Complicité

« Vous avez dîné, et peu importe avec combien de scrupules l’abattoir est dissimulé dans la gracieuse distance des kilomètres, il y a complicité. » Emerson

Il ne s’agit pas de dire que la plupart des hommes sont des criminels mais surtout de prendre conscience des conséquences de nos comportements. Les actes les plus anodins en apparence sont fatals pour des milliards d’êtres innocents et démunis. Quelle que soit la manière d’y participer, cela revient au même. Que les animaux soient tués par nous-mêmes ou que nous déléguions cette tache ingrate à d’autres gens, c’est toujours la mort qui en est la conséquence. Tout achat d’un produit d’origine animale a nécessité une privation de liberté, une torture et un crime. Resterons-nous complices et instigateurs ?

Fermer les yeux ce n’est pas changer la réalité, mais seulement se la cacher. Et se la cacher, ne la modifie aucunement, mais la perpétue.

Ignorer le crime ne nous déresponsabilise pas mais nous rend complices tacites.